Entre pages et cépages : de la maison-musée la Devinière aux caves de Chinon aux côtés de Rabelais

La Devinière, berceau d’un géant des lettres

Nichée comme un bon mot dans une phrase d’esprit, La Devinière se love au cœur du parc naturel régional Loire-Anjou-Touraine. Cette demeure en tuffeau du XVe siècle, classée Monument historique, est le lieu présumé de naissance de François Rabelais. Elle abrite aujourd’hui le Musée Rabelais, seul établissement dédié à cette figure majeure de la littérature française. Le domaine se compose de plusieurs bâtiments remarquables : un logis principal, un pigeonnier-grange du XVIIe siècle, des habitations troglodytiques avec de vastes caves, ainsi qu’une maison de vigneron, le tout entouré d’un jardin, d’un verger et de vignes.

Le musée retrace la vie et l’œuvre de Rabelais à travers une riche collection d’éditions rares, de gravures anciennes et de portraits, dont un signé Matisse. Les pièces, aménagées avec finesse, racontent par petites touches l’épopée gargantuesque de cet humaniste à l’appétit intellectuel insatiable. Saviez-vous que Rabelais avait inventé plus de mille néologismes qui perdurent dans notre langue actuelle ? Une preuve parmi tant d’autres que notre bon François avait toujours un temps d’avance – et probablement un verre aussi 🙂

Les caves troglodytiques offrent une fraîcheur bienvenue lors des chaudes journées d’été. On y descend comme on plongerait dans les profondeurs de la pensée rabelaisienne : avec curiosité et une pointe d’excitation. Ces vastes caves, issues de l’extraction du tuffeau, servaient autrefois de celliers et d’espaces de stockage pour le domaine. Aujourd’hui, elles accueillent des expositions et permettent aux visiteurs de mieux comprendre l’univers de Rabelais.

Le musée est ouvert toute l’année, avec des horaires variant selon les saisons. D’avril à juin et en septembre, il accueille les visiteurs de 10h à 12h30 et de 14h à 18h. En juillet et août, les horaires sont prolongés jusqu’à 19h, tandis qu’entre octobre et mars, le musée est ouvert de 10h à 12h30 et de 14h à 17h, fermé le mardi. Des visites guidées sont proposées, offrant une immersion enrichissante dans l’univers de Rabelais et de son époque.

Depuis son ouverture en 1951, le musée a bénéficié de plusieurs campagnes de restauration et d’agrandissement, notamment l’acquisition et la rénovation des bâtiments adjacents dans les années 1980-1990, ainsi que l’aménagement paysager avec la plantation de vignes en 2004. Ces efforts ont permis de préserver et de mettre en valeur ce patrimoine exceptionnel, offrant aux visiteurs une expérience culturelle et historique unique.

Un musée qui ne se prend pas au sérieux (tout comme son inspirateur)

Le charme de La Devinière, maison natale de François Rabelais située à Seuilly en Touraine, réside dans sa capacité à allier un cadre historique exceptionnel et une approche ludique de la littérature. Classée Monument historique, cette « maison des champs » du XVe siècle est entourée de jardins, d’un verger et de vignes, où les visiteurs peuvent découvrir des installations artistiques aux proportions volontairement absurdes, comme des cuillères géantes et des livres démesurés. Ces objets insolites rendent hommage à l’esprit pantagruélique de Rabelais et captivent aussi bien les enfants que les adultes.

Depuis mai 2024, le musée a enrichi sa collection avec des installations inédites qui célèbrent l’humour et l’extravagance chers à l’écrivain. Les visiteurs peuvent également explorer les caves troglodytiques et le vignoble du « Clos de La Devinière », renouant avec les traditions viticoles du lieu. Ces éléments offrent une immersion unique dans l’univers de Rabelais, où son œuvre prend vie dans un cadre authentique et évocateur.

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Les guides du musée jouent un rôle clé dans cette expérience. Érudits sans être pontifiants, leur approche mêle anecdotes savoureuses et références littéraires avec un enthousiasme communicatif. Ils n’hésitent pas à comparer l’humour subversif de Rabelais à celui des Monty Python, soulignant ainsi la modernité et l’universalité de son œuvre. À travers cette visite, La Devinière invite ses visiteurs à redécouvrir la littérature sous un angle décomplexé et joyeux, fidèle à l’esprit humaniste et satirique de son célèbre occupant.

Pour les épicuriens de l’esprit et du palais

La visite traditionnelle de La Devinière s’enrichit d’expériences immersives qui séduisent les amateurs de littérature et de découvertes originales. Les ateliers d’écriture, par exemple, invitent les participants à s’essayer à l’art de l’hyperbole et du néologisme, dans la pure tradition rabelaisienne. Ces séances créatives donnent naissance à des œuvres oscillant entre le génie et l’absurde, capturant parfaitement l’esprit du maître des lieux.

Les « balades chantées » ajoutent une dimension poétique et musicale à la visite. En parcourant les sentiers qu’empruntait jadis François Rabelais, les visiteurs sont accompagnés par des musiciens interprétant des mélodies Renaissance. Ces promenades offrent une immersion culturelle unique, où les paysages chinonais deviennent le théâtre d’une rencontre entre histoire et musique.

La pause « gargantuesque », quant à elle, célèbre les plaisirs de la table chers à Rabelais. Les produits du terroir sont mis à l’honneur dans un festin généreux qui ravirait Gargantua lui-même. Ce moment convivial rappelle que la philosophie rabelaisienne commence souvent par un ventre plein et un gosier bien humecté.

Enfin, le musée propose également un « parcours sonore » intitulé Un paysage à l’écoute, qui invite les visiteurs à explorer les lieux à travers une expérience sensorielle et littéraire. Ce voyage sonore enrichit la visite en conjuguant poésie et nature, dans un hommage vibrant au génie de Rabelais.

Pour les amateurs de plein air, des sentiers de randonnée permettent de découvrir les paysages qui ont inspiré l’écrivain. Ces parcours offrent une plongée dans l’univers pantagruélique, entre châteaux, villages historiques et abbaye de Seuilly.

Le sentier Rabelais : quand les mots se font paysage

Prolonger l’expérience par une balade sur le « Sentier Rabelais » s’impose comme une évidence. Ce parcours d’une dizaine de kilomètres serpente à travers les vignobles de Chinon comme une digression dans un chapitre rabelaisien – avec plus de cohérence toutefois.

Les panneaux disséminés le long du chemin offrent des extraits choisis qui prennent une saveur particulière lorsqu’on les lit face aux paysages qui les ont inspirés. Tel coteau rappelle la colline où Gargantua s’exerçait à la gymnastique, tel vallon évoque les descriptions bucoliques du « Tiers Livre ». La nature devient soudain un gigantesque livre ouvert, où chaque vigne, chaque pierre raconte un fragment de l’œuvre monumentale.

Pour les marcheurs moins aguerris, pas de panique : le sentier n’exige pas une condition physique de géant. Quelques montées font transpirer, certes, mais elles sont autant d’occasions de marquer une pause méditative – ou de sortir la gourde, au choix. Mieux vaut néanmoins prévoir de bonnes chaussures : Rabelais lui-même n’aurait probablement pas recommandé les tongs pour ce périple littéraro-pédestre.

Dans les caves de Chinon : quand Bacchus rencontre les Lettres

Un détour par les domaines viticoles de Chinon s’impose comme la conclusion logique – et délicieusement alcoolisée – de cette immersion rabelaisienne. L’écrivain, fin connaisseur des plaisirs terrestres, aurait certainement approuvé ce programme œnologique.

​Au Domaine des Béguineries, les caves creusées dans le tuffeau offrent un écrin parfait aux précieux nectars. Converti à l’agriculture biologique depuis 2012, ce domaine familial, repris en 1995 par Jean-Christophe Pelletier, s’étend sur 13 hectares au cœur de l’appellation Chinon. Le Cabernet Franc y développe des arômes qui semblent sortir tout droit d’une description rabelaisienne : « fruité en diable avec une finale espiègle », comme le décrit avec justesse un vigneron passionné. Parmi les cuvées emblématiques, on trouve « Éveil des Sens », un vin rouge vif aux notes de cassis et à la texture généreuse, et « Élégance », un rosé issu du Cabernet Franc, réputé pour sa fraîcheur et ses fruits rouges denses. On hume, on goûte, on approuve – modérément bien sûr, car comme disait presque Rabelais : « Bois pour vivre, ne vis pas pour boire » (ou quelque chose d’approchant).​

Le Domaine de la Noblaie propose quant à lui des visites guidées où la philosophie épicurienne de Rabelais dialogue avec l’approche contemporaine de la viticulture. Une façon élégante de rappeler que l’humanisme rabelaisien, avec son appréciation sensuelle du monde, n’a rien perdu de sa pertinence à l’heure du réchauffement climatique et de l’agriculture raisonnée.​

Non loin de là, les Vignobles du Paradis incarnent une vision solidaire et pédagogique de la viticulture. Créé en 1989 et s’étendant aujourd’hui sur environ 30 hectares en AOP Chinon rouge, rosé et blanc, ce domaine est également un ESAT (Établissement et Service d’Aide par le Travail), permettant l’intégration sociale et professionnelle de personnes en situation de handicap. Les vins produits ici, tels que le « Clos de la Lysardière », reflètent la richesse des terroirs locaux, avec des notes fruitées et une élégance qui auraient sans doute ravi Rabelais lui-même. Une visite s’impose pour découvrir comment passion du vin et engagement humain se conjuguent harmonieusement dans ce petit coin de paradis.

Conseils d’un rabelaisien repenti

Pour tirer le meilleur jus de cette escapade en terres rabelaisiennes, quelques recommandations s’imposent :

• Venez l’esprit ouvert et le sourire aux lèvres – le sérieux est ici un vilain défaut
• Réservez pour les ateliers d’écriture, à moins que l’improvisation ne soit votre fort
• Emportez un carnet pour noter les citations qui vous inspirent (ou vos propres créations verbales)
• Ménagez votre monture pour le Sentier Rabelais – l’eau y est plus rare que le vin
• Prévoyez une journée entière, voire deux – la précipitation est l’ennemie de l’épicurisme
• Si vous visitez les caves, désignez un « Panurge sobre » qui vous ramènera à bon port

Cette exploration des terres rabelaisiennes offre un cocktail rare : culture, nature et gastronomie s’y mêlent avec la même harmonie que dans l’œuvre du grand homme. On en ressort l’esprit aiguisé, les jambes légèrement engourdies et le palais éveillé – une trinité toute rabelaisienne. Alors, comme aurait pu le dire le maître lui-même : « Allez, trinquez, philosophez et cheminez, car la vie est brève, mais l’œuvre demeure ! »

Les vignerons cités

Domaine de la Noblaie

Le Domaine de la Noblaie déploie ses 24 hectares de vignes au cœur de la région Touraine. Le domaine produit des vins sur deux appellations…

Domaine Vignobles du Paradis

Le Domaine Vignobles du Paradis déploie ses 35 hectares de vignes au cœur de la région Touraine. Situé sur le vignoble de Chinon, le domaine…

Domaine des Béguineries

Le Domaine des Béguineries déploie ses 12 hectares de vignes au cœur de la région Touraine. Situé sur le vignoble de Chinon, le domaine produit…

Domaine des Cailloux du Paradis

Le Domaine des Cailloux du Paradis déploie ses 6 hectares de vignes au cœur de la région Touraine. Le domaine produit des vins sur la…