Les vignes ligériennes aiment jouer les caméléons. Ainsi, ce que les manuels de viticulture nomment « Chenin blanc », les vignerons du cru le murmurent souvent « Pineau de la Loire ». Ce nom poétique s’ancre dans une tradition remontant au moins au XIIe siècle, époque où ce cépage s’épanouissait déjà dans les douces campagnes d’Anjou et de Touraine.
Quant au rustique Melon de Bourgogne, il troque volontiers ses habits bourguignons pour ceux, iodés, du « Muscadet » lorsqu’il pousse près de la côte nantaise. Incroyable mais vrai : ce cépage a survécu aux rigueurs du gel de 1709 grâce à son adaptation naturelle dans cette région du Pays nantais. Une belle revanche pour un raisin jadis banni de sa terre natale.
D’autres noms locaux comme le « Côt » pour le Malbec, ou le « Folle blanche » pour ce raisin pétillant d’histoire utilisé dans la distillation, ajoutent à la richesse de ce patchwork ligérien. Ces synonymes de cépages ne sont pas de simples curiosités : ils témoignent de l’ancrage culturel et de l’identité profondément régionale des vins de la Loire, où chaque appellation semble chuchoter son propre dialecte viticole.